Les caméras de surveillance font désormais partie du paysage dans de nombreuses copropriétés. Hall d’entrée, parking, local à vélos ou ascenseur : les associations de copropriétaires (ACP) y voient un moyen efficace de renforcer la sécurité et de dissuader les incivilités. Mais une fois le système installé, une question revient souvent : qui peut visionner les images, et dans quelles circonstances ?
Des images strictement encadrées
La loi belge est claire : les images issues de caméras de surveillance dans les parties communes d’un immeuble à appartements ne peuvent être utilisées que dans des cas précis.
Elles servent uniquement à constater un délit, rechercher ou identifier les auteurs, ou prouver des nuisances ou dommages causés à la copropriété. En dehors de ces situations, leur consultation ou leur conservation est interdite.
Les images ne peuvent être gardées plus d’un mois (article 7, §3 de la loi caméras). Au-delà, elles doivent être effacées, sauf s’il existe une raison valable de conservation, par exemple une enquête policière en cours.
Le syndic, en tant que responsable du traitement, doit sécuriser l’accès au système et au lieu où se trouve l’enregistreur : c’est lui – sauf délégation (voir ci-dessous) – qui peut visionner les images, dans des conditions bien définies.
Bien encadrée, la vidéosurveillance est un outil utile et rassurant ; mal utilisée, elle peut vite devenir source de conflits et de sanctions.
Qui peut visionner les images ?
En principe, seul le syndic a accès aux enregistrements. Il agit en tant que responsable du traitement des données, chargé de garantir la sécurité du dispositif et la conformité de son utilisation à la loi.
Il existe toutefois une possibilité de délégation de compétences : l’Assemblée générale peut, à la majorité des deux tiers, mandater une autre personne – par exemple un membre du conseil de copropriété ou un prestataire spécialisé – pour effectuer certaines tâches précises, comme le traitement ou la consultation des images, sous la supervision du syndic. Cette délégation doit être formalisée et strictement encadrée.
Les autres résidents – copropriétaires ou locataires – n’ont pas de droit d’accès direct. Ils peuvent toutefois demander à consulter les images où ils apparaissent, à condition d’adresser une demande écrite et motivée au syndic. Ce dernier doit alors vérifier que la demande est légitime et qu’elle ne porte pas atteinte à la vie privée d’autres personnes filmées.
Un devoir de confidentialité absolu s’impose au syndic et à toute personne susceptible d’avoir accès aux enregistrements : les images ne peuvent être ni copiées, ni diffusées, ni utilisées à des fins personnelles. Publier une image sur les réseaux sociaux, même pour « dénoncer » un comportement, constitue une violation de la loi.
Transmission à la police : dans quels cas ?
Lorsqu’un délit ou un acte de vandalisme est clairement visible sur les images, le syndic peut transmettre spontanément les enregistrements à la police, à condition que ceux-ci puissent réellement contribuer à l’identification de l’auteur.
La police peut également en faire la demande dans le cadre d’une enquête judiciaire ou d’une plainte. Dans ce cas, le syndic est tenu de collaborer et de fournir les images gratuitement, mais il peut demander une preuve officielle de la mission (ordre écrit, procès-verbal, etc.).
À noter que ni les membres du conseil de copropriété ni les copropriétaires eux-mêmes ne peuvent demander à la place du syndic de remettre des images aux autorités : la décision et la responsabilité demeurent celles du syndic, en tant que représentant légal de l’ACP.
Décider d’installer des caméras : un choix collectif
Avant même de parler d’utilisation, encore faut-il que les caméras aient été installées conformément aux règles. En copropriété, la décision relève de l’assemblée générale.
L’acquisition et l’installation d’un système de vidéosurveillance doivent être décidées à la majorité des deux tiers des voix des copropriétaires présents ou représentés. Les modalités pratiques (désignation du responsable du traitement, entretien, procédures de consultation, etc.) peuvent ensuite être arrêtées à la majorité absolue.
Le syndic, en tant que responsable du traitement – sauf délégation à une tierce personne-, doit ensuite veiller au respect permanent des obligations légales : sécurisation du système, effacement des données, et respect de la vie privée des résidents.
Bien encadrée, la vidéosurveillance est un outil utile et rassurant ; mal utilisée, elle peut vite devenir source de conflits et de sanctions.
Bon à savoir – Installer une caméra, c’est aussi une procédure
Avant toute mise en service, un système de vidéosurveillance doit respecter plusieurs étapes obligatoires prévues par la loi du 21 mars 2007 :
Déclaration préalable : toute caméra doit être déclarée à la police via le site officiel www.declarationcamera.be, au plus tard le jour précédant son installation.
Pictogramme obligatoire : un avis visible doit informer toute personne entrant dans le champ de la caméra. Ce pictogramme doit mentionner :
la mention « Surveillance par caméra – Loi du 21 mars 2007 » ;
le nom et les coordonnées du responsable du traitement (le syndic ou l’ACP) ;
éventuellement, le Délégué à la protection des données (DPO), s’il en existe un.
Registre des traitements : le responsable doit tenir un registre écrit des activités de traitement, consultable par la police ou l’Autorité de protection des données.
Orientation limitée : la caméra ne peut filmer que les espaces communs visés (hall, couloir, parking) et jamais la voie publique ni les portes d’appartement.
Pour une analyse complète des conditions d’installation et des obligations techniques, voyez notre article “Caméras de sécurité : souriez, vous êtes filmés” publié dans Le Cri d’avril 2024.