La vente: une convention liante

Le CRI n°483 - Avril 2024
La vente: une convention liante

Beaucoup de gens s’interrogent sur la procédure de vente et en particulier à partir de quel moment ils sont effectivement liés par leur proposition ou offre.

Peuvent-ils changer d’avis après l’avoir envoyée ? Peuvent-ils se retirer si les circonstances ont changé ?

Cet article tente de répondre à ces questions de manière générale. Nous vous conseillons de toujours bien consulter votre notaire par rapport à votre propre dossier.

Le principe

Le Code Civil stipule très clairement qu’une vente est un contrat consensuel. Cela signifie que le contrat est conclu dès qu’il y a un accord entre les parties au sujet du bien et du prix. Cet accord peut avoir lieu de n’importe quelle manière que ce soit, oralement ou même notée sur un sous-verre.

Evidemment, en réalité, les parties veulent avoir une preuve de leur engagement et dès lors, habituellement, l’acquéreur signe une offre d’achat, acceptée et contresignée par le vendeur. Une telle offre ne permet pas seulement de prouver l’accord en cas de discussion mais donne aussi l’occasion de stipuler plus que le bien et le prix. Par exemple des conditions particulières et suspensives comme l’obtention d’un crédit ou la jouissance reportée.

Dès que la première convention a été faite ou l’offre signée, les parties sont engagées et ne peuvent plus se retirer de la vente, sauf en cas de conditions suspensives ou de commun accord avec l’autre partie, ce qui sera expliqué plus précisément ci-après.

Complexité de ce principe

Comment être certain qu’un accord a été conclu ? Est-ce qu’un simple mail d’un candidat-acquéreur en offrant le prix demandé suffit ? La jurisprudence est partagée, même jusqu’au niveau des Cours d’appel et de la Cour de cassation.

Imaginons la situation suivante : un vendeur met une annonce pour un bien au prix de 300.000 € ; un candidat-acquéreur répond par mail ou par WhatsApp qu’il est d’accord d’acheter ce bien pour 300.000 €, sans mettre d’autres conditions. Le vendeur répond qu’il est d’accord.

Une heure après, le vendeur reçoit une offre d’un autre candidat-acquéreur de 320.000,00 €, ce qui bien sûr est plus intéressant pour le vendeur. Le vendeur accepte cette dernière offre, en négligeant l’offre du premier-candidat.

Est-ce que le premier candidat acquéreur peut intenter une procédure devant les tribunaux en argumentant que, suite à cette conversation par mail, la vente avait déjà été conclue ?

Si on suit littéralement le texte du Code Civil stipulant que la vente est consensuelle, on devrait conclure que la réponse est positive. Pourtant, la jurisprudence est partagée…

Nous conseillons de signer le plus vite possible une offre afin de pouvoir être sûr de l’engagement de l’autre partie.

Par contre, la jurisprudence et la doctrine semblent être claires et unanimes sur le fait qu’une annonce faite par un vendeur pour un certain prix ne compte pas encore comme un engagement mais plutôt comme une invitation pour des candidats-acquéreurs à commencer leurs enchères. Le vendeur doit encore toujours accepter l’enchère en question.

Après l’offre : une procédure formalisée

En Belgique, la vente d’un bien immobilier ne peut être conclue que par un acte notarié. Il est impossible de vendre/acheter un immeuble par un acte sous-seing privé.

Il est possible de passer directement à l’acte authentique, ce qui se fait assez souvent pour des ventes « simples » (par exemple la vente d’un emplacement de parking sans crédit hypothécaire) mais dans la plupart des dossiers, un compromis sera signé avant de passer à l’acte authentique.

ABC de l'achat d'un immeuble
ABC de l'achat d'un immeuble
Conseils à suivre pour réussir vos transactions immobilières
Commander

Le compromis est un document sous-seing privé qui reprend de manière très élaborée tous les accords entre parties et toutes les spécificités par rapport au bien en question (description du bien, prix, conditions suspensives éventuelles, renseignements urbanistiques, état du sol, résultat du PEB, droit de préemption éventuel, etc.). La plupart des documents doivent déjà être communiqués à l’acquéreur à ce moment-là. Si ce n’est pas encore possible, par exemple parce que la ville/commune traîne à communiquer les renseignements urbanistiques, une condition suspensive peut être insérée dans ce compromis.

Comme le compromis est un document sous-seing privé, il peut être rédigé par le Notaire mais aussi par une agence immobilière et il sera signé uniquement par les parties. Ni le Notaire, ni l’agence immobilière ne signent ce compromis.

En général, le compromis est signé 1 ou 2 semaines après l’offre d’achat, afin que tous les points d’accords entre parties soient clairs et consignés.

Dans un délai de maximum 4 mois pour éviter le double paiement des droits d’enregistrements, l’acte authentique devra être signé. Le législateur a prévu que le transfert de propriété, ainsi que le transfert des risques, se passent au moment de la signature de l’acte authentique.

En liant le transfert de propriété et le transfert des risques à la signature de l’acte authentique, et aussi en exigeant plusieurs documents dont la non-délivrance peuvent causer la nullité de la vente, le législateur a en fait un peu érodé le caractère consensuel de la vente.

Est-ce que les parties peuvent encore se retirer entre le compromis et la vente ?

En résumé, la réponse est négative. Les parties se sont engagées et ne peuvent plus se retirer entre le compromis et la signature de l’acte authentique de vente sans être pénalisées. Un bon Notaire mettra des sanctions/indemnités dans le compromis qui joueront dans cette hypothèse et l’acompte reviendra à la partie en tort. Si les parties ne trouvent pas un accord, c’est le juge qui devra trancher et attribuer une indemnité.

Par contre et comme déjà expliqué ci-dessus, la non-survenance d’une condition suspensive ne constitue pas une faute dans le chef d’une des deux parties et empêchera la formation du contrat de vente. L’exemple le plus connu est évidemment l’acquéreur qui ne peut pas obtenir son crédit et qui avait signé l’offre sous la condition suspensive de l’obtention du crédit.

C’est la raison pour laquelle une condition suspensive ne peut jamais dépendre uniquement de la volonté d’une des deux parties.

Dernièrement, les parties peuvent aussi décider de commun accord de résilier le compromis, ce qui va leur coûter 2 x 10 € pour l’enregistrement.

Cette résiliation à l’amiable doit être faite dans l’année après la signature du compromis en question.

Nous espérons que cet article a attiré votre attention sur le fait qu’une vente/un achat n’est pas une promesse à prendre à la légère et qu’il faut toujours bien réfléchir avant de faire ou d’accepter une offre puisqu’ il n’est pas très facile de se retirer après.

Réfléchir avant de commencer…

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
Vous utilisez un navigateur qui ne prend pas en charge toutes les fonctionnalités du site. Nous vous conseillons de changer de navigateur.
×