Droits de succession et donations : bientôt du neuf en Région wallonne

Le CRI n°459 - Décembre 2021
Droits de succession et donations : bientôt du neuf en Région wallonne

Le gouvernement wallon a approuvé un projet de décret qui vise à réduire les possibilités d'évite- ment des droits de successions. A condition que ce projet soit voté par le parlement wallon, il sera d'application pour toutes les successions wallonnes ouvertes à partir du 1er janvier 2022

Ce décret vise trois points selon le Ministre des Finances Jean-Luc Crucke (MR) :

  • Fin de la possibilité de contourner le paiement des droits de succession en effectuant une donation sous terme suspensif du décès du donateur (on ne payera plus de droits d'enregistrement au moment de la donation mais bien des droits de succession au moment du décès) ; Cette technique était très peu utilisée. En cela, la région wallonne suit les décisions déjà prises en Flandre et à Bruxelles.

  • Renforcement du régime de taxation en droits de succession des contrats d'assurance-vie en présence de donations ou de cessions de droits post-mortem (les possibilités d'échapper à la taxation en droits de succession via un mécanisme d'assurance-vie seront fortement réduites).

  • Allongement de trois à cinq années de la mesure anti-abus par laquelle les donations manuelles (non enregistrées) effectuées avant le décès sont quand même taxées en droits de succession ; c'est cette dernière modification qui fait le plus de bruit.

Changement de taxation des "dons manuels" : le délai passe de 3 à 5 ans

La Belgique compte encore parmi les pays qui ne taxent pas les donations mobilières, comme par exemple le transfert d'argent par virement bancaire à titre gratuit.

Il n'y a pas d'obligation d'enregistrer ces donations qu'on appelle encore souvent des dons « manuels », bien qu'il n'y ait plus de remise de billets de banque de la main à la main.

La loi fiscale dans les trois régions prévoit toutefois que le donateur doit survivre plus de 3 ans à ce transfert bancaire, la date de l'extrait bancaire faisant foi.

C'est ce délai de 3 ans qui sera porté à 5 ans pour les successions « wallonnes », mais uniquement pour les donations qui n'ont pas subi le droit de donation.

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Le délai de 3 ans est bien maintenu pour les donations immobilières qui sont toujours enregistrées puisqu'elles ont lieu par acte notarié, ainsi que pour les donations mobilières enregistrées ou passées devant notaire du vivant du donateur.

Le projet de décret ne prévoit pas de règle transitoire pour les donations intervenues avant le 1er janvier 2019 : la taxation se fera sur base du délai calculé au jour du décès, de sorte qu'une donation qui a plus de 3 ans, réalisée sous l'ancienne loi, basculera dans le nouveau délai de 5 ans.

Pour éviter cela, il est toujours possible de procéder à l'enregistrement de la donation au tarif de 3,3 % en ligne directe et 5,5 % dans les autres situations (tarifs wallons).

Qu'arrive-t-il si un donateur change de région moins de 2,5 ans avant son décès ?

Prenons un exemple courant :

Maman transfère 100.000 euros à sa fille par virement bancaire le 15 juillet 2019 à titre de donation.

Maman réside à Bruxelles lors du transfert bancaire, mais décide de s'installer en Wallonie en juillet 2021 où elle décèdera le 25 février 2024.

Comme maman résidait depuis plus de 2,5 ans en région wallonne, sa succession autrefois « bruxelloise » est devenue « wallonne ».

Dès lors, ce sera le délai wallon de 5 ans qui sera appliqué, lequel délai n'était pas écoulé depuis la donation du 15 juillet 2019.

Sa fille devra dès lors rajouter ces 100.000 euros aux autres biens dépendant de la succession de Maman, la taxation se fera au taux marginal suivant :

Assurances-vie : la Wallonie suit la Flandres

Les assurances-vie sont de plus en plus souvent utilisées comme outil de planification successorale.

Le but est de bloquer un capital avec la possibilité de versement d'une rente régulière, les fameuses « branche 21 » et « branche 23 ».

La donation de la police d'assurance est désormais possible par acte notarié ce qui oblige de payer le taux prévu aux droits de donation qui varie entre 3 % et 7 % en Belgique.

La nouvelle réglementation wallonne va suivre la règlementation flamande en exonérant uniquement la partie qui a subi les droits de donation, mais pas la partie des plus-values qui interviendront après la donation.

Cette différence est constituée de la valeur de rachat au jour de la donation et de la valeur de rachat au jour du décès du donateur.

Le meilleur moyen pour éviter cette nouvelle taxation sur les plus-values est de procéder à la souscription d'une nouvelle police d'assurance, par les héritiers sur la tête de leurs parents, lesquels peuvent être « bénéficiaires acceptants » d'une rente pour garantir la pérennité de la police d'assurance.

Ce procédé à un coût ; il faut en parler avec la compagnie d'assurance avant de le faire.

Assurances-vie souscrites par un couple : pas d'impôt sans bénéfice

De nombreux couples souscrivent ensemble la même police d'assurance et prévoient l'accroissement en faveur du survivant ainsi que la liquidation complète de la police uniquement au décès du survivant.

Cette formule fort populaire a fait l'objet d'une circulaire de l'Etat fédéral en début de cette année qui écarte la loi fédérale sur les régimes matrimoniaux en taxant la moitié de cette police au décès du premier décès.

Cette situation crée des difficultés chez les héritiers qui doivent payer des droits de succession sur quelque chose qu'ils ne touchent pas, car la police n'est pas liquidée au premier décès et il se peut que les enfants ne recueillent finalement rien du tout au décès du deuxième conjoint.

C'est pour cette raison que la Région wallonne suivra la pratique en Flandre du « Wait and See » de sorte que la taxation n'interviendra qu'au cas où il y a un bénéfice pour les héritiers, c'est-à-dire lors de la liquidation effective de la police.

En résumé, le Ministre des Finances wallon corrige d'une part une injustice dans les assurances-vie et incite d'autre part les contribuables wallons, à procéder à l'enregistrement des donations mobilières.

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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