Moratoire sur les expulsions : il faudra indemniser les bailleurs concernés

Le CRI n°467 - Octobre 2022
Moratoire sur les expulsions : il faudra indemniser les bailleurs concernés

L’égalité des citoyens devant les charges publiques est à nouveau rompu.

L’arrêt de la Cour constitutionnelle du 14 juillet 2022 est très clair à ce sujet.

Le Syndicat National des Propriétaires et des Copropriétaires (SNPC) a pris connaissance, non sans une certaine surprise, des mesures que le Gouvernement wallon entend mettre en œuvre pour soutenir la diminution des prix de l’énergie et venir en aide aux personnes rencontrant des problèmes.

Si le SNPC peut comprendre dans le contexte actuel l’adoption de mesures spécifiques, il regrette que les bailleurs soient à nouveau « mis à contribution ».

En effet, parmi celles-ci, un nouveau moratoire sur les expulsions domiciliaires entre le 1er novembre 2022 et le 15 mars 2023.

Le SNPC ne peut qu’être interpellé par une telle mesure de nature à causer un préjudice certain aux bailleurs qui, ne pouvant expulser durant cette période, vont voir leur préjudice s’accroître de 4 mois et demi.

Rappelons que pour un certain nombre d’entre eux cela constitue un complément de pension.

Les locataires concernés se sachant protéger par le moratoire ne seront certainement pas motivés à reprendre le paiement de leurs loyers. Bien au contraire, cela va en inciter d’autres à ne pas payer.

Ce n’est pas acceptable et le communiqué du Gouvernement wallon ne dit rien pour ce qui est de l’indemnisation des bailleurs.

Il faudra indemniser les bailleurs !

Or, dans un arrêt récent du 14 juillet 2022, la Cour constitutionnelle aborde cette question et est très claire à ce sujet.

Cependant, la Cour s’interroge dans son arrêt sur le juste équilibre entre d’une part les intérêts du locataire et ceux du bailleur.

Elle précise en effet : « Il appartient cependant à la Cour de vérifier si, par l’adoption de la disposition attaquée, la Région de Bruxelles-Capitale a effectivement ménagé un juste équilibre entre d’une part, les intérêts du locataire d’un bien immeuble dont l’expulsion est interdite et, d’autre part, les intérêts du propriétaire-bailleur, afin que les mesures ne causent pas une restriction excessive au droit au respect des biens du second ».

La Cour Constitutionnelle rappelle un avis de la section de législation du Conseil d’Etat à savoir l’existence d’un « mécanisme d’indemnisation approprié nécessaire au regard de la restriction au droit de propriété du propriétaire bailleur ».

La Cour Constitutionnelle insiste sur la nécessité d’une compensation pour les citoyens lésés par cette mesure :

« Enfin, conformément à l’article 144 de la Constitution, il appartient au juge ordinaire d’apprécier si une indemnisation sur la base du principe de l’égalité des citoyens devant les charges publiques est justifiée, et il lui appartient également d’en fixer le montant.

En vertu de ce principe, l’autorité ne peut, sans compensation, imposer des charges qui excèdent celles qui doivent être supportées par un particulier dans l’intérêt général. Il découle de ce principe que les effets préjudiciables disproportionnés – c’est-à-dire le risque social ou entrepreneurial extraordinaire s’imposant à un groupe limité de citoyens ou d’institutions – d’une mesure de coercition qui est en soi régulière ne doivent pas être mis à charge des personnes lésées, mais doivent être répartis de manière égale sur la collectivité.

Une compensation en vertu de ce principe n’est requise que lorsque et dans la mesure où les effets de la mesure excèdent la charge qui peut être imposée à un particulier dans l’intérêt général. Il appartient au juge ordinaire d’apprécier in concreto, en tenant compte de tous les aspects particuliers et publics de chaque cas, si la charge qui résulte de la disposition attaquée pour le bailleur peut faire l’objet d’une compensation. »

Cet arrêt, d’une part, rappelle les principes et fixe les limites et, d’autre part, ouvre la voie à une indemnisation devant le juge ordinaire, de manière formelle.

La base juridique de ces éventuelles actions civiles ne serait donc pas l’article 1382 du Code civil puisque la Cour Constitutionnelle retient que le principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques est une base pour l’indemnisation des propriétaires qui pourraient démontrer avoir subi une perte financière.

Par contre, le principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques est une base pour l’indemnisation des propriétaires qui pourraient démontrer avoir subi une perte financière.

En plus d’inciter les bailleurs victimes des moratoires Covid et du moratoire à venir à agir contre la Région wallonne en indemnisation, le SNPC appréciera les recours à introduire contre la mesure envisagée d’autant plus si elle ne prévoit au mécanisme compensatoire pour les bailleurs.

CONTACT :

Olivier Hamal, Président du SNPC-NEMS

0475/36.09.17

olivier.hamal@skynet.be

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